Pascal Mono a modifié la Star'ac

Pascal Monaury, dit Pascal Mono, 37 ans, rockeur , ayant galéré dans le milieu depuis 20 ans, oeil droit abîmé, a osé s'immiscer dans une télé-réalité musicale peuplée de jeunes chanteurs : la star'ac 5.

Cher Pascal, quelle audace, quel challenge de t'être inscrit dans cette émission! Quel incroyable voyage à travers les murs de réticence, quelle adresse dans ton côté maladroit. Tu es si adroit quand tu es maladroit : le syndrôme de l'artiste !
Et tu donnes, et tu donnes et tu donnes ! Chez nous, en Belgique, tu colles à notre culture, toi qui es du sud... Mais qui peut être insensible à tant de générosité ?
Oser affronter les regards de quelques rockeurs un peu trop sectaires et les regards des staracadémiciens people un peu beaucoup de mauvaise foi, tout à la fois ! Oser ça , c'est une chose, mais y arriver : quelle victoire!
Peu importe que tu gagnes ou non la Star'ac ! A long terme, même si ta carrière un jour s'arrête, ce dont je doute vu l'étendue intrinsèquement infinie de ton talent aux tentacules multiples, même si un jour tes disques se vendent moins, ce qui ne sera vrai que 50 ans après... ta mort, même si tout ça, il restera de toi l'image d'un gars qui a osé face à des millions de personnes tenir durant 4 mois ce que certains ne savent pas tenir durant une seule seconde en face à face.
Bravo pour les murs abattus, bravo pour les tabous éjectés au seul son de ta gratte, bravo pour les liaisons dangereuses entre des genres d'apparence séparée, bravo pour avoir recollé les clanies idiotes basées sur des poncifs irréfléchis, bravo pour la luminescence dans nos rêves, pour l'éclat que tu donnes à nos oreilles et pour la passion que tu donnes à nos mails.
Bravo d'être toi, bravo d'utiliser ton passé douloureux pour nous rendre heureux ! Bravo d'utiliser ton âme pour grandir la nôtre. Bravo de rester gentil même fâché, bravo d'aimer ta famille sans l'utiliser, bravo de nous aimer...

 

Creep

Qu'est-ce qui fait la différence entre Pascal et les autres ? Raphie l'a souvent dt : l'univers artistique ! C'est ce qui permet de faire carrière et Pascal en fera donc une grande. On le voit d'une façon incroyable en comparant "Creep" et "Belle", deux magnifiques chansons.

Dans "Belle", Jérémy, contre qui je n'ai rien, a une très belle voix si on veut rester objectif mais est monocorde. Là où les aigües de Fiori frappent en contrepoids de la superbe voix cassée de Garou, on a partout une belle voix mais identique. Le public en sort ému, content mais n'a pas touché l'extase et n'a pas été surpris.

Dans "Creep", Pascal a par contre intégré les 3 tableaux différents qui font de la chanson une histoire d'amour. Pascal suit simplement pour ce faire la musique qu'il connait si bien.

Premier tableau :les prémisces. Dos tourné, puis en fond de scène, voix basse et douce, tendrement enroulé, il laisse en évidence la choré de Kamel (respect entre artistes). On entre doucement dans la chanson, le public est attentif mais calme.

Soudain, changement de rythme, la musique s'accélère, deuxième tableau, Pascal jette son corps en arrière, se tourne et avance baissé vers le public comme pour se donner. La voix change, la position aussi, il demande la communion au public de la main et le miracle se fait. Toutes les mains se lèvent, des transes s'installent. Le point fort vient alors, fort mais bref (les orgasmes durent rarement une minute:-)) , tout son corps prépare les trois "run" d'une longévité et d'une puissance incroyables. La magie s'est installée. Un tiers du public applaudit frénétiquement, un deuxième tiers est scotché de plaisir et le dernier tiers a trop d'a priori pour oser bouger mais se dit à l'intérieur "oufti, qu'est-ce qu'il nous a mis là?".

Troisième tableau, retour au calme, Pascal recule , rebaisse la voix, réexplique tendrement. Encore deux soubresauts de folie sous l'aspect d'une note finale folle et de deux doigts pointés vers le bas, puis la fin avec Pascal toujours dans sa chanson pour quelques secondes. Il ne sait même plus qu'il est à la star'ac, il vient de faire l'amour à la chanson (désolé, Sophie:-)).

Une entrée originale, une sortie avec une chute, des variations au milieu et des moments forts où l'artiste surprend : ça demande de l'imagination et de l'imaginaire. 99,99% de la population n'a pas ça. Pascal l'a. Pour notre plaisir à nous. Et comme tout ce qui est rare est cher, Pascal tu nous es cher.

 

Symboles

En dehors évidemment des morceaux de légende des primes déjà cités, Pascal me laisse un tas de SYMBOLES ULTRA FORTS :

1er symbole
Le premier pied de micro envoyé en arrière dans "Sunday" et le même geste sur "tu seras" pour éliminer celui d'Emilie, comme pour lui dire "viens dans mon monde".

2e symbole
Le mec qui bouscule les habitudes en "pénétrant dans le public" et en le soulevant "Sunday", "L'envie","Creep"

3e symbole
Le mec qui dit ce qu'il pense, cite des noms en argumentant, propose, se plante, monte, redescend, enlevant tout préformatage doucereux d'un personnage du château : exemples face aux sms des spectateurs

4e symbole
Le mec qui fait connaître à une nouvelle génération des morceaux de légende. Comme le disait un tout jeune fan sur le forum de la star'ac "Pascal c'est le mec qui chante des trucs qu'on ne connait pas mais qu'on aime bien"

5e symbole
Le mec qui ne parle pas de ses malheurs au château mais qui les fait sortir en chantant lors des primes

6e symbole
Le mec qui offre son oeil crevé en pâture aux caméras et le rend beau.

7e symbole
Le mec qui a osé se montrer face à ses copains rockers en "émilie jolie" ou en "danseur de Madonna"

8e symbole
Sa phrase d'un soir "compétition pour un artiste , c'est absurde. On ne fait pas ça pour gagner mais pour donner du plaisir".

9e symbole
Le mec qui s'auto-engueule au débrief de Raphie en disant "donne, mais donne sinon reste chez toi"

10e symbole
son dernier discours : "merci, Raphie, de nous donner des coups de pied aux fesses. Les artistes en ont besoin".

Grand monsieur !

 

Synthèse

Que restera-t-il de la star'ac (ch.1) ?

un conflit de génération et de style.

D'abord le mou contre le dur. L'avachi levé tard contre le sanguin levé tôt. Le mou essentialiste contre le dur existentialiste.

En tant qu'enseignant chez les ados, le sujet m'intéresse ! Ceux-ci ont mené en finale des symboles forts de leur génération "école de la réussite". On réussit parce qu'on est et non parce qu'on fait. Nous, nous avons encouragé jusqu'en demi-finale les symboles forts de la génération "post 68-tarde". Le cri du rock qui réveille les révolutions sociétaires, sexuelles et philosophiques et le déjantage occasionnel qui évince les vieux tabous.

Alors qu'une demi quinte de toux éveille chez certains l'abandon et que l'abandon actuellement ne signifie plus l'échec puisque l'abandon en semaine lui a donné la réussite le vendredi, n'oublions pas que notre Pascalou a légendifié U2 un soir où il toussait comme un déchaîné et avait 38 de fièvre ! Toute la différence !

Ce qui m'a marqué, c'est la censure de certains jeunes (pas tous évidemment!) envers Pascal entièrement totalement identique à celle de nos parents et grand-parents à nous il y a 30 ans : c'est un gueulard, écrivaient-ils (souvent écrit d'ailleurs geulart, après les navrants "ousse, deors Pascal tèlé !" écrits en gras et en grand" . L'éternelle roue de l'Histoire ! C'est aussi frappant de constater à quel point les posts de ce site sont extraordinairement bien écrits et formulés en opposition avec la SMSisation à outrance des sites de l'autre côté.

Cette star'ac 5 fut une sorte de combat entre la ruse et le travail, entre le jeu politique et le courage du labeur, entre le jeu et l'art, entre le loft et la musique, entre le formatage et le déjantage, entre l'aseptisé et le passionné, entre le minimalisme trompeur et le jusqu’auboutisme rageur.

Plus qu'un combat entre deux générations, vu l'incroyable fourchette d'âge des accros à Mono, ce fut un combat entre deux styles d'existence.

 

Que restera-t-il de la star'ac (ch.2) ?

Les premiers désavoeux des artistes en live.

Bien sûr, des gens comme Obispo, ont toujours réfuté le concept star'ac. Mais, comme c'est la seule émission permettant un "live" pur sur scène, les artistes y venaient en suivant les règles. Bien sûr, les profs avaient déjà eu des préférences mais ils s'étaient tus les autres années, en suivant les règles.

A travers Pascal, cette année, c'est la première fois qu'on voit les professeurs et les artistes aussi embêtés par les résultats; la première fois que Nikos montre vraiment son intérêt pour un élève, la première fois que Raphie et Philippe Lelièvre critiquent en direct sur le site tf1 le vote du public face aux élèves élus; la première fois que des artistes contestent en direct au prime le non choix de l'artiste évident de cette édition 2005.

C'est la première fois qu'éclate aussi évidemment la différence entre un loft basé sur la musique et un crochet musical sans loft. La vie de tous les jours prend le dessus sur le prime, alors que le prime est criard de Pascalograndissubliminal. On se rend compte qu'avec de pareils phénomènes téléréels, les champions du monde de patinage artistique seraient des couples tombés six fois en compétition mais ayant dit : "je t'aime" devant les caméras la veille. Et qu'un mec ayant réalisé un sextuple touloup sans jamais tomber perdrait pour avoir laissé tomber son couteau en beurrant sa tartine ce même soir-là !

On va donc devoir à l'avenir compenser les incompétences techniques et artistiques à long terme (bien naturelles) du public téléphonomaniaque par sans doute des votes compensatoires du monde du show-bizz...

Pascal aura donc été (avec Ely et Emilie) cette année le détonateur émérite du fait qu'une télé-réalité est limitée dès qu'on y intègre un domaine ciblé professionnel, car Ray Charles ou le chanteur de Depeche Mode (aucun rapport avec une staracadémicienne devant se presser) n'auraient jamais eu aucun succès s'ils avaient été issus d'une télé-réalité montrant leur quotidien.

Pourtant, que de plaisir donné via la musique à leurs fans ! Et n'est-ce pas là l'essentiel. D'autant que nous, notre Pascalou nous a plu au quotidien.

 

Que restera-t-il de la star'ac ? (ch.3)

Un kaléidoscope gagne toujours au mélange des genres.

A y regarder de plus près, le panel des élèves choisis et des cours proposés ressemble à un puzzle explosé. Imaginons le même dans une sport'academy avec un casting réunissant Miss Univers, Paula Radcliffe, Zidane et Bigard et qui proposerait comme cours du tir à l'arc mais aussi une étape du Tour de France. C'est à peu près ça !

Faire danser Pascal sur du Madonna était du même enjeu au départ que de faire chanter Maud sur la Traviata de Verdi, faire faire du Chantal Goya à Pierre, un sketch de Jamel à Jérémy, un ballet de Béjart à Magalie, du Billy Idol ou Iggy Popp à Emilie ou faire imiter Angus Young par Jean-Luc.

On a compris que la prod' ne truque pas ou truque peu les votes. Par contre, elle a choisi depuis longtemps, grâce à ce puzzle de provoquer l'orientation des votes de ce public, par des séquences, vidéos, quotidiennes et évaluations ciblées mettant en exergue les qualités et les défauts. On descend celui ou celle qu'on veut par une évaluation aux octaves déchirantes ou à contre-emploi, on organise une activité qui l'énerve, ou on met cette personne au prime dans un duo déséquilibré avec interdiction formelle d'individualisme. Dans la même semaine, on booste d'autres élèves en privilégiant leurs points forts.

Et dans cet amalgame invraisemblable, dans ce puzzle informe aux variations ondulantes; seul un kaléidoscope paré d'une grande faculté d'adaptation peut s'en sortir grandi. On n'a pas comparé audacieusement pour rien Pascal à Freddie Mercury sur ce même forum, car il a tout tenté, tout osé, du dandy torse nu au sérieux Monsieur Loyal, du swinger au rocker, de la danse Madonesque au trapèze volant, du partage pianoté des souvenirs alcoolisés sans son jusqu'aux aigües de Caruso.

Un seul kaléidoscope Mercurien au bout du compte, un seul mec traversant tout ce qui l'a traversé sans concession et sans tabou, un bohémien vous rhapsodiant le vendredi de son départ :
Didn't mean to make you cry if I'm not back again this time tomorrow...
Mama ouh ouh ouh ouh
Pascalou ouh ouh ouh ouh
Anyway the wind blows...

 

Que restera-t-il de la star’ac ? (ch.5) (la fin).

L’humain a vaincu le robot !

Déjà, il y a des siècles, Racine et Corneille se battaient pour savoir s’il fallait dépeindre l’homme tel qu’il est ou tel qu’il devrait être. Aujourd’hui les medias entendent nous dépeindre l’homme tel qu’on peut le fabriquer, le cloner. Pascal a tué ce concept dans l’œuf à l’adolescence de la star’ac.

Non, on ne peut pas impunément face à la caméra imaginer sans l’avoir vécu un scénario catastrophe d’une nièce à qui on pourrait faire du mal plus tard. Non, on ne peut pas impunément face à la caméra, se provoquer des pleurs sur un père qui n’a pas fait ce qu’il devait, quelqu’un qu’on a aimé ou quelqu’un qu’on veut aimer, s’il n’y a pas l’âme.

Le sentiment ne s’achète pas, les pleurs ne se vendent pas, l’humanité ne s’abreuve pas de commercial. L’humanité se vit, se souffre et se concentre à l’intérieur, hors caméra. Alors que toute la médiatisation pousse aux pleurs préparés face à la lumière rouge, Pascal a pleuré à l’intérieur avec quelques larmes au bout d’un cours de sport et dans le jardin, le plus caché possible, au bout d’une certaine solitude.

Le mal de la vie sortait souvent avec une fausseté déconcertante chez certains alors que toute la vie de Pascal, pendant ce temps-là, montait en lui, solitairement dans le travail. On peut imaginer et seulement imaginer les images qui naviguaient au plus profond de ses silences isolés : l’adolescence et les blessures de l’apparence frappées sans réserve autour de lui, les obstacles inhérents à son choix de vie original en tant qu’aîné, le début d’un rêve qui s’est écroulé dans des moments si cruels qu’il a chaviré, ses moments de dépression totale avec noyade probable dans tout ce qui ne sauve qu’à court terme, ses regards dans la glace face à lui-même en train de s’engueuler mais sans le courage alors de remonter la pente, ses cris de désespoir internes qui se perdent dans ses tripes. On peut l’imaginer, mais seulement l’imaginer…

Puis sûrement, la rencontre : l’espoir Sophie et la nouvelle vie avec la naissance de Paul.

Alors, le second souffle, il va le gueuler au monde. Avec force et même peut-être avec violence, mais une violence complètement positive. Brecht disait : « tout le monde se plaint de la violence de certains fleuves, mais personne ne se plaint jamais de la violence des rives qui les enserrent ». Alors, il va casser les rives, et braver les tabous et les poncifs. Il va rentrer dans l’arène, gueulant dans un théâtre, pour son fils sa bataille. Il va nous lancer des cris de détresse si courts mais si puissants que nous avons tous tremblé. Il y avait dans ces octaves mirifiques comme une renaissance à la vie.

Il ne peut y avoir autant de puissance vibrante que s’il y a eu auparavant une vraie souffrance humaine du fond de l’océan. Là, il ne joue plus, il est trop vrai. Et il donne tout de sa main gauche, la seule qu’il puisse voir facilement bouger. Il va jeter son humilité aux pieds de Johnny, caresser avec une tendresse infinie les souffrances partagées à la fin de son duo avec Nolwenn. Il va tout donner de lui pour retrouver le respect des autres et surtout retrouver le respect envers lui-même.

Alors qu’il est nominé et que sa femme, sa chance, l’interroge, il répond : « je prépare l’avenir ». Et avec Pagny , il chante les yeux au ciel, sous le regard merveilleusement touché de Raphie : « Trouver en soi un avenir peut-être et surtout l’envie d’être ce qu’elle attend de vous ».

Pascal n’a jamais triché parce que Pascal a vécu. Pascal n’a pas triché avec nous. Il n’a même jamais triché avec lui-même. Il aurait pu « truster » ou « scorpioniser » avec ses vieux compères un « fuck the society et la star’ac aussi ! ». Il aurait pu larmoyer à l’écran sur sa vie passée, il a préféré dire à Jérémy sur le fronton du château : « Toi, tu les fais pleurer, et moi, je leur redonne l’espoir ». Et il a réussi, car on a tous envie d’y croire !

Pascal Mono ne pleure plus sur lui-même, Pascal Mono rit ! Pascal Monaury !
Sa musique va devenir notre opium, sa résurrection en a déjà fait un grand homme.

 

 

Indiscrétion venue du ciel : Pierre Corneille a réécrit « le Cid » à propos de l’entrevue entre Pascal et Universal.

En vers et en alexandrins, bien sûr !

 

Pour sortir un single à jeter dans la rue ? »

Rocker, planer, vibrer toute l’humanité »

Un extrait de compo, un nouvel univers ? »

Des tripes et de l’envoi pour que le public morde »

Nous sommes un label qui partout réussit

Tous nos vœux et désirs s’appellent bénéfice

Nous apporter des sous, que ta musique puisse. »

Je sors de la galère, du fond du précipice

A savoir si un jour mon fiston témoignait

Dirait de tout son corps, pour sûr, mon père rockait »

Fichtre diantre putain (c’est le nouveau langage)

Pas la peine à ce jour d’en faire tout un fromage

J’ai bossé comme un fou à Dammary-lez-Lys

Accompagné des mous et fait des sacrifices

J’aime tant la musique, en plus de mes ballades

Tout mon périphérique se traduit en rockade

Vas-tu nous proposer comme lune de miel ? »

A l’abri de ces bombes et loin des faux palaces

Pour un rock assassin, j’ai même composé « vivre »

Pour faire vibrer les miens et toutes vos convives

J’ai parlé des « étoiles » pour nous illuminer

Et pour la terre entière, composé « elle, elle sait ! »

Je vous offre ma vie, je vous offre mes sons

Je vous laisse le marché, je garde le frisson

Et je vais avec vous me mettre à compter

Les recettes du bien qu’on se donne à rêver »

Daniel Gobert

Février 2006